Nouvelle adresse La fermeture de la galerie Al Manar a, sans conteste, laissé un grand vide à Casablanca. Spécialisée en art contemporain, la galerie avait pendant plusieurs années accueilli les plus grands peintres abstraits marocains et s’était faite une solide réputation de sérieux, grâce en grande partie à ses deux gérants : le couple Gorius. La crise que connaît le marché des arts plastiques n’a pourtant pas empêché ces deux amoureux du Maroc et de la peinture de revenir à la charge. C’est à Marrakech, en effet, que Christine et Alain, forts de leur expérience Al Manar, ont élu domicile et s’occupent dorénavant d’un nouvel espace : la galerie-librairie Les Atlassides, espace consacré à la peinture et au livre (littérature, beaux-livres, livres d’artistes). Les Atlassides accueillera, donc, diverses manifestations culturelles : expositions, signatures, projections vidéo… C’est d’ailleurs là que s’est faite la signature du livre de Abdellatif Laâbi et Mohamed Kacimi, Ruses de vivant, paru aux Éditions Al Manar. À signaler, les peintures reproduites dans le livre sont les dernières que Kacimi a peintes avant son décès. Tel Quel, n° 122
Les expos des Atlassides : 2004 (Direction artistique : Alain et Christine Gorius)
Le 4 avril 2004 a eu lieu la pré-inauguration des "Atlassides" (dans le cadre des premières Rencontres de poésie de Marrakech, initiées par l'IFM), en présence d'un public nombreux - et attentif aux propos d'Abdellatif Laâbi, qui signait Ruses de vivant, recueil de poèmes illustré/accompagné/co-réalisé par notre ami regretté, Mohammed Kacimi. La galerie-librairie "Les Atlassides", dont l'architecture intérieure est épurée, sobre et chaleureuse à la fois, a paru rallier tous les suffrages. Depuis lors, elle ne désemplit guère ! Le lieu est de qualité ; l'ambition de ceux qui l'animent est grande : il s'agit de faire des Atlassides l'une des places incontournables de la vie intellectuelle et artistique au Maroc. Rien de plus ; rien de moins.
(Au quarantième jour suivant le décès de Mohammed Kacimi, hommage a été rendu à l'artiste, à l'Institut du Monde Arabe, à Paris. Nicole de Pontcharra, Adonis, Jean-Loup Pivin et Alain Gorius ont évoqué la mémoire de celui qui demeure l'un des artistes essentiels du Maroc contemporain. Voici l'intervention d'Alain Gorius. "Quelques mots seulement,
pour témoigner d'une relation très confiante et amicale
avec Mohammed Kacimi.
peintures de Cette première exposition donne le ton : quatre peintres marocains de première force y sont rassemblés, manifestant par leur présence leur soutien à notre projet de créer un lieu d'où serait bannie toute forme de médiocrité en art : aux Atlassides, rien de commun ; telle est désormais notre devise... Quatre grands peintres du Maroc d'aujourd'hui, représentatifs de la diversité de la démarche contemporaine au Royaume de l'Extrême-Couchant. Deux générations d'artistes : celle de l'Indépendance, qui a vu surgir, avec Cherkaoui, Gharbaoui, Belkahia, Melehi, l'idée même de contemporanéité ; et celle qui assure - avec quelle allure - la relève : Binebine, peintre et romancier, qui expose aux quatre coins de la planète ses masques expressifs, ses chairs pleines de matière et de lumière ; et Yamou, plus secret, plus intérieur, composant d'étranges mondes mi-végétaux, mi-aquatiques, où la poésie et la grâce avec la feuille composent... Plusieurs livres d'artistes créés par Belkahia, Binebine, Yamou, sont également présentés au public.
|
||||
Trois peintres marocains, deux femmes, un homme : trois autodidactes qui allient humour et fantaisie. Rahma Laroussi et Lagzouli habitent Rabat ; Zohra s'est fixée à Vichy, France, où elle a été découverte par Luis Marcel, galeriste impénitent, spécialiste de l'art brut, qui a beaucoup travaillé avec Chaïbia Tallal... Elle expose pour la première fois dans son pays d'origine. Trois peintres à découvrir.
Rahma Laroussi
ne cesse de peindre, depuis l'enfance. Elle n'a pas eu à passer
par l'école pour apprendre son art : depuis toujours déjà
elle le pratiquait. Art brut ? Non pas : auto-apprentissage, au long d'une
vie. Art naïf ? Pas plus : cette peinture relève davantage
de l'impression, que de l'observation.
Mohammed Lagzouli témoigne de ce qu'il connaît - il le représente comme il le voit et, par là même, s'inscrit en faux contre l'imagerie folklorique stéréotypée qu'a, notamment au Maroc, diffusée un académisme orientalisant. Sempiternels guenilleux, mornes kasbahs, gazelles, porteurs d'eau… En véritable naïf, Lagzouli, lui, veut montrer le vrai visage des choses. Il a, d'instinct, le sens de la vérité des images - et ces images contribuent à établir la vérité. Aucune place, dans son œuvre, pour le caprice et la gratuité. Ce qu'il peint est révélation, qu'il doit aux autres autant qu'à lui-même. Il apporte à la peinture la fraîcheur d'un regard puisant toutes ses forces dans le désir et l'urgence de dire le monde tel qu'il est, ou comme il devrait être. Mais souvent on considère
l'artiste naïf de haut : il y a de la condescendance à le
dénommer ainsi. Il est vrai que l'art "naïf" est
aussi, pour certains, une petite industrie assez rémunératrice...
On le voit bien au Maroc, où d'habiles marchands fabriquent à
volonté cette variété d'"artistes" - ces
faux naïfs encouragés par de vrais roublards qui, spéculant
sans vergogne sur l'ignorance des uns et des autres, font commerce de
barbouillage. C'est de tout autre chose que nous entretient Mohamed Laghzouli
: du Maroc, qui se défait en se recomposant, et de ce qui, d'hier
à aujourd'hui, perdure.
(Mohamed LAGHZOULI, né en 1937 à Salé, vit et travaille à Salé. Expose depuis 1960. Principales expositions : Rabat, Paris, Tunis, Casablanca, Alger, Téhéran, Lausanne, Clermont-Ferrand… "Conteur malicieux, Laghzouli présente des scènes de la vie rustique, de la rue, ou le monde des cafés. Les figures, qui se détachent sur un fond aux tonalités fluides, renferment une puissance onirique étonnante, et l'on comprend pourquoi on a parfois parlé, à propos de ses œuvres, de "surréalisme naïf"… Abdeslam BOUTALEB, La Peinture naïve au Maroc) Zohra Saber,
dite Zohra, d'origine Touareg, est née en 1966 ; elle expose pour
la première fois au pays qui l'a vue naître. Sa famille s'est
installée en France alors qu'elle avait huit ans ; depuis elle
a souvent exposé dans l'Hexagone, sous la houlette de Marcel Luis,
grand connaisseur de l'art brut (il a créé deux musées
d'art brut en France, et été dans ce pays le marchand de
la regrettée Chaïbia).
Novembre 2004 : première exposition de Maoual au Maroc. Ce peintre et graveur, natif d’Essaouira, s’est fixé à Marseille depuis bientôt trente ans. Il a, là-bas, étudié la peinture et la gravure, travaillé, aimé, fondé une famille, lutté, bâti une réputation, une carrière. Aujourd’hui il rejoint les Atlassides, et l’on se réjouit de pouvoir faire découvrir un travail authentique, et novateur, à qui dans ce pays s’intéresse aux arts : Marocains de Marrakech, Marocains du Maroc, Marocains de cœur, de hasard ou de passion qui, venant des quatre coins du monde, se croisent et se retrouvent dans la capitale du Sud… Comme, avant lui, Azouzi et Binebine, qui ont inauguré leur carrière marocaine à la galerie Al Manar, Maoual assurément connaîtra aux Atlassides le succès que mérite son œuvre. Une production inventive et forte, aux confins de la tradition artistique africaine (gravure, sculpture subsahariennes ; matériaux de récupération) et de l’art contemporain occidental (fortes réminiscences, parfois, du Picasso solaire de l’époque minotaurine) : on la découvrira, présentée en permanence, aux cimaises de la galerie Les Atlassides. Alain GORIUS
Maoual, une œuvre
Chez ce graveur, les lointains se rapprochent et se conjuguent. Le neuf et l'ancien, les traditions picturales, les modernités du Maghreb et de l'Europe s'interpénètrent. Toutes sortes de ressourcements, d'idéogrammes, d'interférences et de symboles se dédoublent, se mixtent ou bien s'affrontent. On aperçoit sur ses planches des myriades de détails, une intense chorégraphie. On déchiffre des silhouettes, des deuils, des échardes, des naissances et des ombres qui peuvent évoquer la haute Egypte ou bien les fresques du Tassili. Simultanément, on rencontre du bruit et de la fureur, des éblouissements, des greffes et des surgeons, des épisodes périphériques, un arsenal de guerre moderne, un téléphone portable ou des débris d'ordinateur. La confusion n'est jamais totale, les dissonances n'empêchent pas l'établissement d'une profonde harmonie. (…) Les empreintes, les transparences, les scarifications, les pulsions, les tatouages et les retours de flamme qui traversent les corps en mouvement de ses personnages construisent d'étranges échographies. Sa technique est profondément empirique. Maoual obtient ses surimpressions, ses reliefs et ses encrages à partir de plaques de frigidaire préalablement découpées, martelées, trouées ou bien reforgées. Tout ce qui peut émouvoir et chambarder un corps humain, ses joies charnelles, ses accidents, ses mutilations, ses transes, ses disputes et ses délivrances, ses espoirs de filiation ou bien son vieillissement se retraduisent et se répercutent sur des flaques de couleur dont les nuances et les compositions sont extrêmement raffinées, à l'intérieur desquelles les noirs et les blancs qui sont largement prépondérants, peuvent se distendre, se grisonner ou bien se bleuter. Alain PAIRE
MAOUAL Bouchaïb
Né le 26-02-1959 à Essaouira. Diplôme National Supérieur d'Expression Plastique à l'école Supérieure des Beaux-arts de Marseille (France). Vit et travaille à Marseille.
EXPOSITIONS PERSONNELLES
2004 Galerie Martagon Malaucène 2003 Galerie du musée du Patrimoine, Six fours ; Galerie Martagon, Malaucène, Galerie Annie Lagier, L’Isle sur Sorgue 2002 Galerie Alain Paire, Aix-en-Provence ; Poinso-Chapuis, Marseille ; Galerie JP Cupillard Grenoble 2000 Galerie Martagon, Malaucène, Galerie Palladion, Toulouse, 1998 Galerie Alain Paire, Aix-en-Provence, 1997 Galerie Aronowitsch, Stockholm, 1995. Agora, Marseille 1987 et 1989 Galerie "M" à Lindau en RFA 1987 Galerie Alma, Lyon
EXPOSITIONS COLLECTIVES (sélection)
Collection 2004 Artothèque de Miramas ; Galerie C, Amiens 2004 ; Référence marocaine d’art contemporain Amiens 2004 ; Une année d'estampe à L'Atelier M, Marseille 1999 ; Les 25 ans de la galerie Athanor, Marseille 1999 ; Pur Impur, Aix en Provence 1999 ; Artothèque de Miramas 1998 ; Musée des Alpilles, St Rémy de Provence 1998 ; Galerie JM Cupillard Grenoble 1998 ; Galerie Daniel Amourette à Rouen 1997 ; Galerie Martagon Malaucène 1997 ; Aix invite Marseille 1997 ; Collection / Donation Y. Michaud, Musée de Céret 1997.
Maoual a participé a de nombreuses biennales internationales d'arts graphiques : Espagne, USA, Norvège, France, Yougoslavie, Italie, Pologne, Pays-bas, Japon.
COLLECTIONS PUBLIQUES
Musée de Céret (France) ; Fonds communal d’Art contemporain de Marseille (France) ; Artothèque St Maur (France) ; Médiathèque Intercommunale de la Ville de Fos (France) ; Bibliothèque Nationale de Paris (France)
BIBLIOGRAPHIE : Peintures et sculpture à Marseille au XX° siècle, par Alain Paire édition Jeanne Laffitte. Gravure, de Bonnard à Baselitz Le Corps, Posture et imposture, les Cahiers thématiques 2000-2001, Médiathèque intercommunale Fos. Istres. Miramas. Gravure, art et techniques. Catalogue de l'exposition du musée des Alpilles.
| ||||
Les
textes et images présentées sur ce site sont la propriété
de la galerie et des éditions Al Manar - Reproduction interdite
|